Garder son rythme
Liaambrosia m’a demandé un article sur la chronobiologie. Comme tout le
monde j’ai vaguement entendu parlé de cette notion… je sais que cela
consiste en l’étude des rythmes biologiques et que ses principales
applications (du moins à ma connaissance) concernent la médecine (le
même médicament, pris à des heures différentes pourra être très
bénéfique, ou neutre, ou même carrément néfaste !) et la pédagogie au
sens large puisqu’il y a des heures où il est plus facile d’apprendre,
de mémoriser, de réfléchir, etc…
Autrement dit, je ne suis vraiment pas
spécialiste de la question, ne m’étant jamais vraiment penchée sur le
sujet. Ceci dit, je la note pour plus tard car elle me paraît
intéressante. Il y a effectivement des moments dans la journée où l’on
est plus ou moins apte à faire telle ou telle chose.
Par contre, cela
m’a inspiré une réflexion sur les rythmes de vie. Question capitale car
si elle échappe largement à notre contrôle conscient, elle n’en
détermine pas moins la plupart des aspects de notre vie. Notre société
va vite, trop vite. Pour être un battant, pour être « in », il faut
être rapide. Ceux qui ne le sont pas s’épuisent à courir derrière les
autres, ceux qui le sont s’épuisent à rester devant et à ne pas trop
ralentir. Cela commence dès l’école primaire ou au mieux, dès le
collège : avec les devoirs le soir, seuls les plus rapides ou les plus
insouciants ont le temps de jouer… les autres ont à peine le temps de
prendre leur goûter, de faire leur travail qu’il est déjà l’heure du
marathon « bain, repas, dodo »… Pour tous les examens, la rapidité est
un critère de réussite, vu que tout est en temps limité… Les élèves «
trop lents » n’ont jamais le temps de montrer ce qu’ils savent
véritablement faire.
Dans la droite ligne de l’école, la vie
professionnelle favorise les rapides, les glorifie et les montre en
exemple à tous les lambins qui ne parviennent pas à faire en deux
heures ce qu’il faudrait trois heures pour faire correctement. Tant pis
pour eux… à eux les heures sup’, payées ou non…
S’échiner à prendre un
rythme qui n’est pas le sien est une des meilleures façons de se rendre
malade. Ceux d’entre nous qui ont fait un tout petit peu de course
d’endurance (et à l’école, on en a tous fait, non ?) le savent bien :
si on part au même rythme que le plus rapide de la classe, que ce soit
pour épater la galerie ou par méconnaissance de son vrai rythme, on est
à peu près sûr de ne pas arriver au bout du tout !
C’est vrai dans tous
les domaines. Si on ne respecte pas son propre rythme, on n’arrive à
rien de bon.
De plus, le monde, les choses, les êtres, les plantes ont un rythme donné, il y a des saisons, il y a le cycle jour-nuit et on ne peut impunément feindre de l’ignorer éternellement. Bosser en deux-huit ou pire en trois-huit est dangereux pour la santé. Si on plante des tomates en hiver, elles gèlent. Si on tente d’apprendre quelque chose à un enfant qui n’est pas prêt pour cela, on le blesse. On peut faire des crèpes sans prendre le temps de laisser reposer la pâte… mais c’est moins bon. Chaque chose doit arriver en son temps… c’est un lieu commun sur lequel nous pourrions réfléchir plus longuement.
Dans la vie de
couple aussi, les différences de rythmes peuvent peser très lourd et
devenir difficilement supportables. Il suffit de penser à deux
personnes, une « du soir » et l’autre « du matin »… qui se croisent
plus qu’ils ne se voient. Au bout d’un moment, le terme « vie commune »
perd de son sens ! De la même façon, un « rapide » aura peut-être du
mal à supporter longtemps un « lent » (et réciproquement!). S’ils décident de partir
pique-niquer au pied levé et que l’un est prêt en trois minutes (le
temps de prendre ses clefs et son manteau) et que l’autre met une
demi-heure ou une heure à se préparer, le premier risque au bout de
toute cette attente d’avoir bien moins envie de partir. De même, à
table, si l’un engloutit son repas en 10 minutes alors que l’autre
apprécie de le déguster tranquillement, il va y avoir des frustrations…
Mais si l’un fait des efforts démesurés pour s’adapter au rythme de
l’autre,
surtout si c’est pour aller plus vite que son rythme, il va perturber
son équilibre et en souffrir.
Toute la difficulté consiste à trouver son propre tempo au milieu de la
foule. Et à le garder. A oser affirmer sa lenteur ou sa rapidité… même
si c’est en contradiction avec le rythme ambiant…
Et pour les « rapides
» peut-être d’apprendre à ralentir pour prendre le temps de profiter…
du coucher de soleil, d’un bon repas, d’une discussion entre amis… sans
être esclave de sa montre. (Sont-ils rapides par conformité aux exigences de la société, ou juste rapides?)
Car voilà peut-être un des grands coupable
de notre course perpétuelle : la montre.
Pouvons-nous cesser de lui
obéir comme à un dieu ??? Au moins de temps en temps?