L'aquoiboniste
Nous avons été interviewées par France Inter, qui n'a pas diffusé notre interview. Par habitude, je continue à me connecter sur leur site "au cas où".
Cette semaine, j'étais agréablement surprise de voir que, récemment, Raffa a été interviewée. Raffa et Hooly sont deux pointures du blog engagé qui m'ont donné envie, à mon tour, de faire passer le message... C'est dire si j'ai du respect pour leur travail, leur point de vue et leur engagement. Je me réjouissais donc de lire la chronique de Messieurs Abiker et Boussageon à son propos.
Mais une fois de plus, j'ai été déçue par l'image que l'on donne des écolos. Déçue et profondément en colère.
Non seulement ils ne semblent retenir du blog de Raffa que la recette de la pâte dentifrice, de façon anecdotique mais ils indiquent aussi qu'"on a même le droit de trouver ces chroniques militantes un peu rébarbatives".
Rébarbatif : voilà ce que le discours écolo inspire à la plupart de mes congénères. Ils sont chiants ces écolos avec leur discours de restriction et d'économie! Combien de fois me dit-on : "oh arrête de jouer ton écolo!" parce que je propose le co-voiturage ou l'économie d'énergie.
Ras le bol!
Ras le bol de passer pour une emmerdeuse quand j'essaie simplement de préserver l'avenir de mes enfants!
Ras le bol de vivre dans ce pays d'égoïstes qui donneront bientôt 50 euros au Téléthon histoire de se soulager la conscience mais qui sont incapables, le reste de l'année, dans leurs actes quotidiens de réduire leurs déchets/emballages/consommations/bouffe pour qu'il en reste aux autres!
Ras le bol des reportages à venir sur "le triste anniversaire du tsunami" quand personne ne s'occupe sérieusement du réchauffement de la planète!
Ras le bol de ces catalogues de Noël qui regorgent de conneries en plastique, à piles, fabriqués par des enfants de l'âge de ma fille, et qui, eux, ne connaitront peut-être jamais le plaisir de jouer avec ce qu'ils auront fabriqué!
Rébarbatif, c'est tout ce que mon dégoût peut inspirer à ces gens-là...
Trouverons-nous "rébarbatif" le fait de plus pouvoir nous chauffer ou nous abreuver dans quelques décennies? Trouverons-nous alors "rébarbatives" les lois qui nous obligeront à vendre nos voitures, à devenir végétariens, à être rationnés en eau quand toutes les ressources de la planète seront épuisées?
Je pense à toutes ces pubs soi-disant écolos qui mettent l'accent sur des produits de consommation : la voiture non-polluante (aberration!), les cométiques bio à la mode ou les fringues en coton équitable tendance!
Je pense à l'image que les gens ont des écolos : des soixante-huitards sur le retour qui mangent des graines d'oiseaux, s'habillent en chanvre et fument des pétards à longueur de journée en cultivant leurs panais, pieds nus et crasseux.
Je pense à ce petit bouquin "L'écologie pour les paresseuses" où l'on voit sur la couverture une femme avec un bonnet péruvien, un gilet en laine et un mouton sous le bras.
Je pense à cet article de Marie-France sur les cosmétiques bio rigolos ou à celui dans Cosmopolitain sur "l'homme bio" parce que le bio est un accessoire de mode comme le fût autrefois la fourrure.
Je pense à ces pubs pour les salons bio où l'on vente "la pause détente, les produits zen pour se ressourcer" comme si le bio était une destination de vacances. Personne ne semble comprendre qu'il en va de notre SURVIE.
Nous sommes des amuseurs de foires, des illuminés, des utopistes (ne nous l'a-t-on pas dit sur ce blog des dizaines de fois?), des rigolos, des gentils agitateurs, des bêtes de cirque, des clowns.
Nous n'arriverons jamais à convaincre le plus grand nombre de ralentir la croissance.
Imaginez que toute votre famille soit réunie autour de la table (cousins, oncles, tantes, enfants....) Vous apportez le repas principal, vous vous servez la moitié du plat et vous donnez encore un quart à vos enfants, ne laissant plus pour le reste de la famille que le quart restant à se partager. Il y a fort à parier que tous vous feraient une remarque cinglante et qu'aucun ne trouverait votre façon d'agir juste et équitable. C'est pourtant ce que nous, occidentaux, nous faisons avec le reste du monde. Et tout le monde trouve cela normal...
Tout le monde? Non, pas moi. Ni Aspen. Ni nos fidèles lecteurs... Mais voilà le problème : c'est qu'ici, nous nous tapons sur le ventre entre gens convaincus. Qui vais-je toucher vraiment à travers ce blog? Si vous lisez régulièrement, c'est que vous êtes vous-mêmes écolos ou soucieux de l'environnement, à votre niveau.
Les autres, les gaspilleurs, les pollueurs, les égoïstes, les matérialistes, les "winners" auront devant ce blog la même réaction que les journalistes : au mieux ils trouveront cela amusant, rafraichissant, zen et trouveront là l'occasion de réaliser une chronique ou un article susceptible d'intéresser les "bo-bo" dont parle Renaud dans sa chanson.
Au pire, ils trouveront une fois de plus ce discours "rébarbatif" et préfèreront aller noyer leur conscience ou ce qu'il en reste dans une coupe de champagne servie dans une boîte à la mode...
Une de mes amies pensent que les hommes ne font pas partie de la Nature car ils représentent la seule espèce capable de s'auto-détruire et de détruire ce dont elle a besoin pour vivre. Elle est très fataliste et attend la fin du monde avec le sourire.
Je n'en suis pas encore là, parce que je ne supporte pas l'idée qu'un jour mes enfants puissent manquer d'eau ou puissent mourir de faim. Mais je suis fatiguée de m'entendre dire que je suis utopiste ou alarmiste. Et je repense à cette chanson de Gainsbourg où le héros souffle à chaque refrain "à quoi bon? à quoi bon?"
Récemment, un rapport scientifique a montré aux autorités que le changement climatique engagé est tel que, si rien n'est fait, nous vivrons une crise comparable à celle de 1929 dans moins de 10 ans. Inflation, famine, épidémies, chômage démentiel, voilà ce qu'était la dépression dans les années noires.
Parfois je me dis que la meilleure façon de m'y préparer, c'est de me détacher de tout bien matériel. D'apprendre à vivre le plus possible en autarcie, en autonomie, pour être capable le jour où la nourriture, l'eau et le chauffage me manqueront, de brûler mes meubles de famille, mes photos, mes billets de banque, de manger uniquement ce que la Terre voudra encore bien me donner, de savoir fabriquer des vêtements, d'ouvrir ma maison à ceux qui n'en auront plus...
Me replier sur moi : éteindre la radio, vendre la télé, ne plus savoir comment "dehors" le monde s'auto-détruit. Ne plus fréquenter les magasins, les villes, ce pays. Continuer à apprendre à mes enfants à se débrouiller seuls, à n'attendre rien ni des autres, ni du travail, ni de la science, ni du progrès.
Continuer sur le chemin de la Simplicité Volontaire et sur la voie du Respect d'autrui. Partir vivre de l'autre côté de la barrière, là où la crise et la dépression sont le lot quotidien et où chaque jour de plus en vie est un Bonheur.
http://www.lefigaro.fr/eco/20061031.FIG000000142_le_rechauffement_un_peril_a_milliards.html
http://www.radiofrance.fr/franceinter/chro/blogapart/index.php?id=48938